Les efforts entrepris, d'une part, en France, par le Général Legros et le Major Renson; d'autre part, à Londres, par le Lieutenant-Colonel Wouters et le Capitaine de Soomer, en vue de reconstituer une aviation militaire belge sur le sol britannique, sur la base de trois escadrilles de "Hurricanes" et de deux sur "Blenheims", allaient connaître un réel rebondissement dont l'épilogue était inattendu et ce, malgré les interdictions formelles et réitérées des autorités belges en France.
La débâcle des armées françaises et l'annonce de l'armistice franco-allemand provoqua une première série de départs non autorisés d'aviateurs qui quittèrent le continent par les derniers bateaux, quelques-uns en avion, d'autres en gagnant Gibraltar, l'Espagne ou le Portugal.
Les premiers aviateurs arrivés en Angleterre furent bientôt rejoints par deux groupes d'élèves-pilotes venant du Maroc.
Entre le 24 juin et le 5 août 1940, et ce malgré les ordres qui interdisaient tout départ, 124 aviateurs et élèves-pilotes furent regroupés, d'abord à Tenby pour les uns et au Centre d'lnnsworth, près de Gloucester, pour les autres. A partir du 14 août 1940, ils furent tous rassemblés au dépôt de Saint-Athan, dans le Pays de Galles.
N'ayant ni état-major, ni matériel, ni personnel technique, il ne pouvait être question de reformer l'Aéronautique militaire.
Un accord conclu avec l'Air Ministry permit l'incorporation des aviateurs belges dans la " RA F Volunteer Reserve ", Trente d'entre-eux furent immédiatement incorporés dans des unités opérationnelles.
Seize pilotes belges furent répartis entre sept escadrilles de "Hurricane" du Fighter Command, tandis que quatorze autres pilotes, observateurs et mitrailleurs furent désignés pour deux unités du Coastal Command 46.
Les autres furent mutés pour les centres d'entraînement.
Les aviateurs belges furent donc présents à la Bataille d'Angleterre.
Durant les trois mois que dura celle-ci, ils abattirent 21 avions ennemis de façon certaine, 6 le furent probablement, tandis que trois autres furent gravement endommagés .
Huit aviateurs furent tués au cours de la même période .
Après la Bataille d'Angleterre, les volontaires belges ne cessèrent d'affluer.
Ils venaient de tous les coins du monde: de Chine, d'Amérique du Nord et du Sud.
Mais plus nombreux encore étaient ceux qui arrivaient de Belgique, après des séjours plus ou moins longs dans les prisons et camps français, espagnols, portuguais et autres.
En Europe occidentale, une ligne d'évasion avait été créée par des aviateurs belges.
Le sergent Deffet fit ainsi passer les frontières à près de 90 aviateurs, tandis que le Wing Commander Boussa, après avoir effectué ses tours d'opérations et commandé une escadrille belge de la RAF, se fit parachuter en France et y installa un camp de regroupement pour aviateurs, en mars 1944.
En août, il parvint à franchir les lignes allemandes pour rejoindre les troupes alliées au Mans avec 157 aviateurs alliés.
Les arnvees incessantes d'aviateurs et de candidats aviateurs permirent la création d'une école de pilotage franco-belge à Odiham et, à partir de 1942, d'un dépôt, situé à Goring-on-Thames.
A leur sortie des écoles, la RAF désignait les pilotes belges dans ses unités au même titre que les aviateurs britanniques, d'où j'extrême dispersion du personnel belge dans 142 unités différentes.
Pour constituer des unités entièrement belges au sein de la RAF, il aurait fallu dix fois plus de personnel au sol que de personnel navigant, ce qui se révéla impossible.
A partir de février 1941, le Squadron 609 comptait un flight constitué de pilotes belges et, en août, le Squadron 131 en comptait un également.
Puis, on constitua le Squadron 350 qui était entièrement belge.
L'année suivante, au début de 1943, on mit sur pied, une seconde escadrille nationale, le Squadron 349.
Sans cesse au combat, les aviateurs belges participèrent à toutes les opérations du Fighter Command Jour et nuit, ils exécutèrent des missions au-dessus du continent, notamment lors du raid sur Dieppe, combattant l'aviation ennemie ou attaquant les objectifs les plus divers, participant activement à la désorganisation des transports et des communications de l'ennemi en apportant leur concours à la protection des bombardiers.
Chaque jour, le nombre d'avions allemands détruits devint plus important.
Le 10 janvier 1944, le pilote Georges Jaspis remporta la 100e victoire aérienne des aviateurs belges en Grande-Bretagne en abattant un Ju 88 dans les environs de Bruxelles .
D'autres pilotes belges, dispersés dans les escadrilles britanniques, s'illustrèrent à Malte, en Afrique, au Moyen-Orient et aux Indes.
En Egypte, un flight belge faisait partie du Squadron 272.
De sa base d'Alexandrie, cette unité rayonnait sur la Crète, Malte et la Sicile.
Le premier aviateur belge tombé sur le théâtre méditerranéen fut le pilote Georges Reuter, tué le 19 mai 1941, près d'Agedabia.
Les pilotes Christian Ortmans, Lucien Javaux, Zeger Van Riel, Pierre Arend et Caryn combattirent en Extrême-Orient.
Les trois premiers y furent tués en action.
Outre cette présence d'aviateurs belges sur tous les fronts du globe, il fallait remarquer que plusieurs d'entre eux reçurent le commandement d'escadrilles, voire de wings britanniques.
Ce fut d'ailleurs un belge, le Squadron-Leader Leroy du Vivier, qui fut le premier aviateur étranger à commander une unité britannique.
Une mention particulière devrait souligner l'action des équipages belges du Bomber Command qui participèrent aux bombardements d'objectifs en France, en Belgique, en Hollande, à Berlin, Hambourg, Leipzig, la Ruhr, Turin, Milan, etc ... Parmi eux, le Wing Commander Florent van Rollegem, qui commanda une escadrille britannique de " Lancaster ".
Les exploits des équipages de bombardiers moyens et légers ne furent pas moins importants.
Ils participèrent aux actions au-dessus du continent européen ou sur les rivages de la Méditerranée, au-dessus de la Libye, de la Tunisie, de la Crête de la Grèce ou de l'Italie.
Les aviateurs belges prirent également part aux missions du Coastal Command, à bord de "Blenheim" ou de "Beaufighter". Volant de jour comme de nuit, franchissant des milliers de kilomètres à la rencontre des convois qu'ils devaient escorter et protéger, ils menèrent sans relâche une chasse tenace et implacable aux sous-marins allemands.
Quelques pilotes belges firent partie des " Photographic Reconnaissance Units", chargés de réunir les renseignements nécessaires à la préparation des raids de bombardement et à l'estimation des résultats obtenus sur les objectifs attaqués.
Il y eut également des Belges au Transport Commando Ceux-ci assurèrent notamment des liaisons vers le Canada, l'Afrique ou les Indes.
A la fin de la guerre, le Squadron 525 était exclusivement constitué d'équipages belges.
Les "Walrus" du Sea Air Rescue furent également montés par des Belges.
Ils avaient pour mission de rechercher et de recueillir les aviateurs alliés tombés en mer.
En bref, durant toutes les années de guerre, de juillet 1940 à mai 1945, il y eut des aviateurs belges dispersés sur toute l'étendue du Royaume-Uni et sur tous les fronts du globe, non seulement à la Royal Air Force, mais également à la Royal Canadian Air Force, à la South African Air Force, voire à la United States Air Force.
Deux belges servirent dans cette dernière.
Le premier, Charles Goffin, pilote de "Fiat" en 1940, refusé à la RAF pour un défaut de vision, s'engagea à l'U S A F et fut tué à Mersch (G.-D. Luxembourg) le 8 septembre 1944 à bord d'un "Thunderbolt".
Le second, Ledure, ancien aviateur de la première guerre mondiale, termina la seconde avec le grade de major de l'armée américaine.